Kamasutra
Les positions du Kamasutra:
Dans "kâmasûtra", "sûtra" signifie : "traité ; recueil de sentences, daphorismes" ; "kâma" désigne "lamour, la jouissance, le plaisir sensuel". Les Kâmasûtra sont donc des "recueils daphorismes sur lamour". Un livre de Vatsyayana La tradition de ces recueils est très ancienne, remontant à plusieurs siècles avant lère chrétienne. Aux premiers siècles de notre ère (entre le Ie et le Ve siècles), un certain Vatsyayana sest proposé de réunir en un volume, en les résumant, tous les ouvrages sur le sujet. Vatsyayana est persuadé que la connaissance du Kâma est indispensable à lépanouissement humain, et veut offrir toute linformation nécessaire en un volume accessible : cest ce texte qui a été sauvegardé jusquà nos jours et traduit depuis le XIXe siècle dans des langues européennes. Pas uniquement des positions ! Les Kâma Sûtra de Vatsyayana, ses conseils pour lamour, ne sont pas limités aux positions érotiques : celles-ci noccupent dailleurs quun chapitre sur les sept de louvrage, soit cinq pages sur environ deux cent cinquante ! Les autres chapitres traitent du mariage et du rapport entre hommes et femmes hors du mariage ; un chapitre est plus particulièrement destiné aux courtisanes, et a dailleurs circulé à part dans leurs milieux ; le dernier regroupe des informations sur les moyens dexciter le désir, avec des recettes médicinales. Le Kâma Sûtra : un livre pour tout public Ce qui frappe un occidental daujourdhui dans les Kâma Sûtra, cest la liberté de ton pour parler de la sexualité. Louvrage est ainsi destiné aux hommes, aux jeunes filles "avant leur mariage", aux femmes publiques. Ses connaissances sont censées garantir : Aux femmes publiques : le respect des hommes ; Aux épouses : la préférence de leur mari (dans une société polygame) ; Aux hommes : la certitude de conquérir vite le cur des femmes. Les Kâma Sûtra sont donc destinés à tout public, pour les connaissances sexuelles de base dans le couple marié ou non : ce nest pas un livre qui vise un public restreint de libertins recherchant des raffinements sexuels particuliers. Que trouve-t-on dans les Kâma Sûtra ? Les Kâma Sûtra évoqueront donc tout à fait naturellement les problèmes posés par le rapport entre la taille de la verge et celle du vagin comme élément de lharmonie sexuelle, les différences dans lintensité du désir charnel ou dans le temps consacré à la sexualité, le rôle de limagination. Les variantes des enlacements, des baisers, et, bien sûr, des positions du coït, sont énumérées, mais aussi celles des morsures, des égratignures avec les ongles, des coups donnés ou reçus, des "sons" (dont le plus spontané semble être le cri "maman" au moment suprême !). Si la femme na pas dorgasme pendant le rapport, Vatsyayana conseille de recommencer, et, en cas de nouvel échec, de "frotter le sexe de la femme avec ses mains et ses doigts" jusquà ce quelle soit calmée. La grossesse est prise en considération ; les fantasmes, comme celui de penser à une autre personne que celle avec qui lon est uni, sont évoqués ; les jeux de bouche ou la pénétration anale sont décrits ; lhomosexualité masculine ou féminine na pas de traitement à part, et napparaît que comme une des variantes des moyens daccès au plaisir. Cependant, la pudeur est reconnue comme normale : la femme ne doit pas faire des avances, il va de soi quelle nest pas tenue daccepter de but en blanc les attouchements intimes ou la pénétration. Un mari, ayant choisi une vierge, doit attendre trois jours avant de commencer des jeux intimes et se donner encore une semaine pour progressivement arriver aux rapports sil ne veut pas susciter le dégoût chez sa femme et être rejeté par elle. Notre vision des Kâma Sûtra comme simples recueils de positions érotiques est donc particulièrement réductrice et caricaturale. Ce sont les ouvrages érotiques postérieurs, écrits notamment pour commenter le livre de Vatsyayana depuis son époque jusquau XVIIIe siècle, qui vont détailler les positions de base décrites par celui-ci. Des descriptions froides et objectives Peut-on dire au moins que telle position est plus classique, ou plus érotique, ou plus acrobatique dans les Kâma Sûtra ? Non, même pas, parce que ce recueil énumère "objectivement" et sans jugement qualificatif les différentes figures : "lorsque la femme lève ses deux cuisses toutes droites, cela sappelle la position levante. Lorsquelle lève ses deux jambes et les place sur les épaules de son amant, cela sappelle la "position béante". Lorsque les jambes sont contractées... Lorsque lhomme sappuie contre un mur... Lorsquune femme se tient sur ses mains et ses pieds comme un quadrupède et que son amant monte sur elle comme un taureau, cela sappelle le "congrès* de la vache". Lorsquun homme jouit en même temps de deux femmes... Les gens des contrées méridionales ont aussi un congrès dans lanus, qui sappelle le "congrès inférieur". Pourquoi alors ces énumérations "froides" ? Parce que "une personne ingénieuse doit multiplier les sortes de congrès... Car ces différentes sortes de congrès [...] engendrent lamour, lamitié et le respect dans les curs des femmes". Un enseignement à poursuivre ? Pour nous, occidentaux, chez qui la morale et la religion culpabilisent la recherche du plaisir dans la sexualité, cest un dépaysement total que de constater que depuis des millénaires, on estimait banal dapprendre aux jeunes gens et aux jeunes filles à savoir quoi faire pour queux-mêmes et leur partenaire tirent le maximum de satisfaction du jeu de leur corps. * Congrès : au XVIIème siècle, au sens de "coït", désigne une épreuve judiciaire où un couple devait tenter un rapport sexuel devant témoins lors de procès pour nullité de mariage |
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